mardi 1 novembre 2011

At the sound of the Polisse

Je ne vais jamais au cinéma. Il m'arrive d'en avoir envie, mais au prix d'un ticket chez Gaumont, je préfère largement préparer un repas sympa pour deux ou aller voir un concert dans une petite salle parisienne. Le cinéma est hors de prix, soyons réaliste. En 1996, une entrée dans mon petit cinéma de province coûtait à peine 30 francs, soit 4,5 euros (certes, en tarif jeunes). Je ne vais pas assez souvent au cinéma pour m'abonner à une quelconque salle, et j'y vais d'autant moins que le prix des billets à l'unité est scandaleux. Qui peut se permettre d'aller au cinéma deux fois par semaine de nos jours ?

Bref.

Le mois dernier, je me suis rendue deux fois dans des cinémas, fait assez rare en soi. J'y ai vu deux films français (là, c'est carrément surréaliste), et si les deux m'ont beaucoup plu, le deuxième reste depuis gravé dans ma tête et il risque de me marquer pendant encore très longtemps. Il s'agit de Polisse, de Maïwenn. C'est d'autant plus facile que le film a bénéficié d'une bonne grosse campagne de pub et que Maïwenn et Joey Starr ont couru un véritable marathon promotionnel ces trois dernières semaines. On ne pouvait pas les louper.



Comme à son habitude, Maïwenn nous fait le coup de la mise en abîme. Comme d'habitude, on ne sait pas trop s'il s'agit d'un docu ou d'une fiction. Comme d'habitude, c'est plutôt génial. Pourquoi ? Parce qu'on passe du rire aux larmes (je n'exagère pas, j'ai même eu peur que mes voisins entendent mes sanglots incontrôlables lors d'une scène émotionnellement insoutenable), parce que le côté documentaire est hyper crédible, parce qu'on sent que les tranches de vie que Maïwenn partage avec nous ont réellement été vécues, parce que les acteurs sont tous magistraux (on en reparle plus loin), parce que les enfants sont bluffants, parce que c'est captivant et choquant, parce que la construction du film est idéalement faite, de telle façon qu'on a toujours le temps de reprendre son souffle entre deux horreurs. C'est cru. C'est violent et émouvant. Nous sommes tous comme le personnage de Maïwenn, témoins involontaires de l'indécence du monde qui nous entoure. Mais ça, tout le monde l'a déjà dit.

Alors histoire de faire la mauvaise élève de la classe, celle qui passe son temps à râler, je souhaiterais revenir sur quelques points que j'ai trouvés regrettables, justement dans une oeuvre aussi particulière.

D'abord, il faut arrêter avec Joey Starr. Tout le monde a passé son temps à vanter ses mérites, à souligner à quel point il impressionne dans ce rôle de flic, un gros dur au coeur tendre, alors qu'il faut être honnête : ce film a été écrit pour lui. Ce rôle, c'est lui. Sa propre mère l'a dit : elle ne comprend pas ce que les gens trouvent si merveilleux dans le fait de voir Joey Starr dans ce rôle puisque ce qu'elle voit, elle, c'est juste son fils !

Par ailleurs, c'est Joey Starr qui s'est tapé tout la promo ou presque. Ca tombe bien, puisqu'il a justement un album qui sort au même moment et qu'il a pu faire d'une pierre deux coups. Mais où étaient les autres acteurs ? Parce que celles que j'ai trouvés vraiment magnifiques dans ce casting, ce sont surtout Marina Foïs et Karine Viard. Et finalement, ce sont aussi les plus discrètes. Qu'on ait moins entendu dire à quel point elles étaient brillantes me semble une grave injustice.

Ensuite, j'avais entendu Audrey Pulvar chez Ruquier dire qu'elle trouvait dispensable la relation amoureuse entre le personnage de Maïwenn et celui de Joey Starr (ce avec quoi il était entièrement d'accord, il s'est même levé pour lui serrer la main). Eh bien ils ont entièrement raison, tous les deux. Non seulement c'est cliché (et ce n'est pas le seul aspect cliché du film), inutile et assez ridicule, mais ça n'apporte strictement rien à l'histoire. C'est amené comme un cheveu sur la soupe et le côté "la belle et la bête" qu'on a déjà vu 2000 fois agace beaucoup. Le flic bourru mais gentil dans le fond déteste cette photographe qui s’immisce dans son quotidien. Selon lui, elle cherche à appâter le public avec des images racoleuses. Alors un jour, il lui passe un savon, lui dit d'arrêter de s'habiller en dame et d'enlever ses lunettes, et la voilà transformée. Puis, ils dansent un slow et hop, ils tombent amoureux. Euh, ouais, mais sinon, le fait que les deux personnages n'aient absolument rien en commun, ça ne gêne personne ? Euh, moi, un peu...



Et puis le coup de la réalisatrice qui joue le rôle d'une cinéaste amateur/réalisatrice/photographe dans tous ses films, ça commence à devenir lassant. On n'a pas besoin d'elle et c'est flagrant dans Polisse, et plus gênant que dans Pardonnez-moi ou Le Bal des Actrices. L'histoire, ces petites chroniques du quotidien de la brigade de protection des mineurs se suffisent à elles-mêmes.

Maintenant que j'ai couvert d'insultes Polisse, que j'ai exprimé mes petites frustrations inhérentes à l'oeuvre, je vais enfin pouvoir continuer à savourer sa beauté, sa poésie et son charme pendant de longues années. On ne peut rester de marbre devant ce film dérangeant et profondément humain. On passe par toute une palette de sentiments : du dégoût, du mépris, de l'incompréhension, du bouleversement, de la compassion, mais jamais de l'indifférence, et c'est toute la force de la nouvelle pépite de Maïwenn.

dimanche 27 février 2011

Voyageons dans le temps avec Julia Stone

Je hais Télérama. Ce n'est pas nouveau, ça fait au moins 11 ans que ça dure. Je n'y peux rien, il y a un truc qui ne passe pas dans leurs articles, pour moi. Ils ont toujours un côté bien-pensant-donneur-de-leçons-méprisant qui m'agace. Dernière preuve en date : leur chronique du premier album solo de la jeune Australienne Julia Stone, plus connue pour le duo qu'elle forme avec son frère Angus.

L'article en question, s'il prétend n'émettre qu'une "légère réserve" à l'encontre de The Memory Machine fait en réalité tout l'inverse. D'abord, de cet album, le journaliste ne parle pas tout de suite, trop occupé à digresser sur le fait que l'un des titres d'Angus et Julia Stone ait servi de musique de pub et à se gargariser d'avoir, pour sa part, découvert cette chanson bien avant le commun des mortels que nous sommes. Bien entendu, tout ce qui devient "commercial" devenant aussitôt bon à jeter, le pauvre groupe n'a pas tardé à perdre tout intérêt aux yeux d'Hugo Cassavetti. Il dit que ce n'est pas à cause de ça, que c'est parce qu'à force, le matraquage publicitaire a fini par avoir raison de son attrait pour la chanson. Ce monsieur doit vraiment beaucoup regarder la télé parce que pour ma part, je n'ai JAMAIS vu cette pub. Je n'avais jamais non plus vraiment écouté l'album (ni la fameuse chanson) d'Angus et Julia Stone avant aujourd'hui, même si je les connaissais de nom.

Bref, dans la suite de son article, le journaliste nous raconte en quoi le disque serait bien (notez l'intéressante utilisation du conditionnel, ici), mais pourquoi les "maniérismes vocaux" de Julia Stone l'irritent finalement. Et c'est tout, hop, affaire classée.

Hum...

Cette semaine, alors que je bossais, j'ai écouté, d'abord d'une oreille distraite, puis plus attentive l'enchainement parfait de My Baby, Winter on the Weekend et The Memory Machine et je n'avais pas été touchée comme ça par des chansons depuis assez longtemps (enfin, hormis ça). Les mélodies épurées et la voix bouleversante m'ont soudain happée et je ne m'en remets toujours pas. La simplicité désarmante de ces compositions et la sincérité de l'artiste n'en finissent plus de me charmer et elle a désormais acquis mon éternelle gratitude (oui, c'est comme ça avec moi, il suffit même que vous fassiez une chanson géniale un jour et vous gagnez ma reconnaissance et mon respect à vie, même si vous ne sortez plus que des bouses par la suite).



Par curiosité, j'ai donc cherché quelques informations sur cette fille et j'ai jeté une oreille sur ce qu'elle avait fait avec son frère. Pour le coup, la magie n'a pas du tout opéré, je suis passée complètement à côté de leur deuxième album et je n'ai pas envie de me retourner. J'ai reconnu le style de Julia dans deux chansons et j'ai pensé qu'elles auraient pu figurer sur son album solo, mais le reste m'a juste rappelé Cocoon et laissée de marbre.

Certes, sa voix d'enfant quand elle chante 'Daddy, why don't you protect me, someone's gotta hurt me' peut paraître surjouée mais si ça fonctionne à la première écoute sur moi, alors que je suis tout sauf réceptive à ce genre de chanteuses théoriquement, c'est que Julia Stone possède le petit quelque chose qui fait la différence. Normalement, je suis censée trouver ça dénué d'originalité et ennuyeux, ne jamais avoir envie d'écouter le disque, et pourtant, j'en suis à ma quatrième écoute depuis ce matin. En dehors des trois pépites précitées, il tient la route de bout en bout, ce qui devient si rare que cela mérite d'être souligné. Et la façon dont Julia Stone est capable de moduler sa voix, dans les graves ou dans les crescendo mérite toute mon admiration.

Alors n'écoutez pas ce que vous disent des journalistes aigris qui détestent que le public leur vole leurs vedettes. Ecoutez The Memory Machine, c'est le frisson garanti. S'il ne fallait qu'un seul argument supplémentaire pour vous convaincre : vous ne trouvez pas que cette pochette est ce que vous avez vu de plus classe depuis longtemps ?

samedi 29 janvier 2011

Festival Mo'Fo' aux Mains d'Oeuvre - Cheveu et Heavy Trash

L'affiche de cette soirée me narguait depuis de longues semaines mais l'état de mes finances me retenait de me précipiter sur les premiers billets venus. Finalement, deux jours avant, je n'y tenais plus et c'est en courant que je me suis rendue à la FNAC la plus proche pour me procurer les pass tant désirés.

Quoi, me direz vous, Encore Cheveu aux Mains d'Oeuvre ? Deux fois en moins d'un an ? Oui, bon, mais c'était tellement intense la première fois qu'ils m'ont fait succomber une seconde. Et puis, il y avait Heavy Trash, et je n'avais jamais eu l'honneur de voir John Spencer en chair et en os.

Le trajet des Hauts de Seine à la Seine Saint Denis fut épique et épuisant. Mais c'est sains et saufs que nous arrivâmes sur place. Avant le début d'un concert digne d'intérêt, nous eûmes le temps de faire un détour par la brocante vintage et les stands des petits disquaires présents. Le tout était plutôt alléchant mais malheureusement, mes poches vides ne me permettaient pas de me ruer sur la jolie robe Courrèges 1954. Autour de nous, beaucoup de trentenaires branchouille mais sans-le sou mangent du couscous végétarien en buvant de la Grolsch. Mais disséminés ça et là dans les allées, on peut aussi apercevoir des quinquagénaires collectionneurs avides de vinyls perdus.

Nous prîmes ensuite la direction de la scène Mo' pour assister au concert d'Eldia, groupe dont je ne connaissais que le nom, pour l'avoir vu un paquet de fois sur des affiches ou dans Lylo. Finalement, la prestation des cinq jeunes gens n'avait que peu d'intérêt pour moi (même si les groupies des premiers rangs n'étaient pas de cet avis) et c'est donc dans un relatif ennui que la soirée débuta. Tout cela manquait vraiment de caractère.

Une bonne demi-heure de queue au bar plus tard, la foule de plus en plus dense et agitée retourna dans la salle. Avec son pull complètement troué et son allure de clodo sous acide, le chanteur de Cheveu fait peine à voir. Mais au bout d'une minute, on est déjà tous fascinés. Les gens hurlent, sautent et moi, je n'arrive pas à détacher mon regard de ce type aux épaules en dedans qui parle en levant le bras et en scandant ses phrases comme un prédicateur ou un homme politique.



Mais à la fin de chaque chanson, il s'excuse, visiblement pas convaincu lui-même de sa performance. C'est vrai qu'il n'a pas l'air aussi sûr de lui que la dernière fois, mais c'est normal, il ne joue presque que des nouveaux titres. Ca fait du bruit, c'est prenant et fort et le mec gesticule pour essayer de nous persuader de je ne sais trop quoi. Dociles, on ne veut pas le contrarier alors on le suit quand il nous raconte une sombre histoire de ville sans oiseaux ou rend hommage à Charlie Sheen qui "a quelques soucis en ce moment".



Malheureusement, l'heure tourne et la peur de louper le début d'Heavy Trash sur la scène Fo', commence à se faire ressentir. Armés de courage, nous traversons donc la salle en évitant les coups des jeunes pogoteurs survoltés et arrivons sans encombre de l'autre côté. Mais tout est calme. John Spencer n'a pas encore commencé son show.

Un tout autre spectacle nous attend. Dans la deuxième salle, le public est tellement hétéroclite que si on ne connaissait pas le programme, on se demanderait vraiment à quoi on va assister !

Mais aux premières notes de l'orchestre, c'est le retour dans les fifties garanti. Jon Spencer habite littéralement la scène, on voit bien qu'il y est chez lui. Quel charisme ! Rapidement, le public se laisse emporter par sa voix de crooner aux manières de bad boy. Le groupe, vêtu de costumes bleu marine assortis à l'ambiance de sa musique, gomina comprise, enchaîne les titres à un rythme trépidant. Il fait chaud, les musiciens transpirent et nous aussi. Il faut dire que les spectateurs, tous âges confondus, se sont mis à danser. Les gens sont heureux, sourient, boivent et tapent dans leurs mains, signe que le concert est réussi.



Entre les morceaux, Jon Spencer nous raconte des choses quasi-incompréhensibles à cause de son accent sudiste forcé et de sa vitesse d'élocution difficile à suivre. Lorsque, le dernier titre achevé, les lumières se rallument, c'est fâché qu'il quitte la scène à regret. Il réussira à se faire entendre par l'équipe organisatrice et rejoindra cette grande fête pour trois nouvelles chansons. C'est bien simple : on dirait qu'il ne veut plus partir.



Pourtant, il le faudra bien car il est déjà près d'une heure du matin. On s'étonne de voir tant de monde encore à Saint-Ouen, mais on comprend que louper la fin de ce concert aurait été criminel.

C'est le sourire au lèvre, malgré le mal de dos et de jambes et la perte sensible d'audition, que nous regagnons la voiture, satisfaits de cette soirée riche en émotions fortes. Heureusement, le retour sera bien moins pénible que l'aller.

jeudi 13 janvier 2011

Explosion imminente - Roses Kings Castles et Suburban Timebombs

J'aime beaucoup Adam Ficek. Vraiment. Sans rire, ce type a un don pour la mélodie assez incroyable. Résultat : il suffit d'écouter l'un de ses disques un matin pour fredonner ses chansons pendant tout le reste de la journée. C'est encore pire si vous avez l'occasion de le voir en live, ce qui m'est arrivé hier pour la troisième fois en moins de deux ans. Ses ritournelles s'accrochent à votre cerveau comme un nourrisson au sein de sa mère et c'est un vrai plaisir.



En novembre 2010 est sorti le deuxième album de son projet solo Roses, Kings, Castles, pourtant achevé depuis bien longtemps. Et le moins que l'on puisse dire est qu'il ne nous déçoit pas. Si la tendance spontanée est une nouvelle fois de se dire que c'est sympathique sans plus, méfiez-vous de l'effet boomerang de One Born Every Minute, Backseat Living ou Twisted Words. Incontestablement, Adam Ficek reste toujours aussi accrocheur et charmant et n'a pas perdu son sens de l'humour (Shut your Stupid Little Mouth en est la preuve). Suburban Timebombs est un poil plus rythmé et énervé que son prédécesseur. En effet, cette fois, l'ex-batteur devenu auteur-compositeur-chanteur s'est entouré d'une dizaine de musiciens pour l'enregistrement. Mais "énervé", il ne l'est pas autant que son successeur, comme nous le confiait Adam à l'issue de son showcase chez Gibert Musique. 



Le pauvre a eu une année 2010 difficile, durant laquelle il s'est fait virer de Babyshambles sans préavis d'une manière assez crasseuse. Et il a aujourd'hui parfois le sentiment de recommencer à zéro (bon, c'est vrai que la dernière fois que je l'avais vu à l'espace B au mois de mai, on ne devait pas être plus de dix). Il a été écœuré par l'industrie du disque anglaise dans laquelle il faut payer pour avoir une critique positive, lessivé par sa tournée mondiale, presque ruiné par la sortie de ses disques, et la colère qui le menaçait a fini par le submerger complètement. Suburban Timebombs porte bien son nom : Adam Ficek était au bord de l'explosion au moment de le baptiser. Mais lorsqu'il nous annonce que son prochain album sera plus dur, plus basé sur les guitares électriques, il n'a pas de mal à nous convaincre. D'ailleurs, les deux chansons extraites du futur opus esquissées en conclusion du showcase en témoignent : les petites ballades romantiques et douces, c'est fini pour le moment.



Mais ce qui l'aide à tenir, comme bon nombre d'autres artistes contemporains, c'est tout simplement l'amour de la musique. Car s'il déplore que des tas de parasites pullulent autour des musiciens depuis des décennies alors qu'ils ne sont même pas mélomanes, il fait partie de ces personnes qui ne peuvent vivre autrement que par leur passion. Et s'il envisage la possibilité d'être obligé un jour de reprendre un job complémentaire et d'arrêter de tourner, il ne s'imagine tout de même pas une seconde abandonner la musique. Et c'est tant mieux pour nous.

dimanche 2 janvier 2011

Un réveillon 4 étoiles

Mesdames et Messieurs, pour le réveillon du nouvel an de cette année, j'avais réservé à mes invités un repas digne des meilleures tables de restaurant (en toute modestie). Je ne résiste pas à l'envie de vous le faire partager.


Tout d'abord, pour les mises en bouche, j'avais opté pour des cuillers garnies rapidement et en grande partie avec les restes. Ci-dessus, vous voyez donc des moules assaisonnées de carrés de tomate fraîche, de piment et de persil. Ensuite, sur la droite, vous pouvez voir des lamelles de saumon fumé marinées au citron, aux baies roses et à l'aneth. Enfin, sur la gauche, on trouve des lamelles de carpaccio de boeuf mariné à l'huile d'olive, au vinaigre balsamique, avec des raisins secs, des pignons, du parmesan et du basilic frais. Le tout arrosé de champagne, bien sûr. Si les moules se sont avérées décevantes, le reste a bien fonctionné, même si le carpaccio aurait mérité d'être plus relevé.



J'avais aussi prévu des petites coupelles de crevettes avec des épices (piments, épices tandoori et curry), des tomates et de l'huile d'olive. Pas mal, mais assez piquant. Si comme moi, vous aimez le piment, c'est assez réjouissant.

L'une de mes convives avait complété ces petits plats avec des blinis au tarama et des tapas. Il faut dire qu'on aime bien les apéros copieux, par chez moi !

Pour l'entrée, j'avais concocté un tartare de Saint-Jacques à l'huile de vanille, pas mauvais du tout. J'avais préparé mon huile de vanille la veille, avec du jus de cuisson de moules, de l'huile d'olive, du citron, du poivre et des graines de vanille, et je l'avais laissée mariner pendant plus de 24h00. Le résultat a été assez probant, parfumé à souhait et léger. J'ai mélangé des dés de tomate aux Saint-Jacques et ai servi sur un lit de mâche assaisonné de la fameuse huile.



Pour le plat, j'ai fait revenir dans une sauteuse des échalotes et une carotte dans du vinaigre de vin que j'ai laissé évaporer. Ensuite, j'ai ajouté du vin rouge corsé et un bouquet garni, avec du sel et du poivre et j'ai laissé mijoter pendant une heure. L'appartement embaumait jusque dans le couloir, mais c'était de circonstance ! J'ai ajouté quelques cuillers de fond de veau au mélange et j'ai poursuivi la cuisson pendant une autre heure. Cette préparation longue n'était destinée qu'à servir de base à la sauce de ma viande : des noix de chevreuil. J'ai fait revenir les morceaux dans de l'huile d'olive et du beurre, de chaque côté, et je les ai ensuite réservés au chaud. Pour parachever ma sauce, j'ai ajouté des carrés de chocolat noir corsé au mélange. J'ai servi le tout avec une purée de céleri et mon plat a remporté un franc succès, en grande partie grâce à la qualité de la viande de mon boucher.


Avec cette viande d'une tendresse incroyable, j'ai sorti de ma cave personnelle un magnum de Monbrison 2004 que j'avais eu en cadeau quelques années plus tôt et je dois dire que personne n'a été déçu du mariage du plat avec ce vin !


Pour finir ce réveillon, j'avais préparé une gelée de fruits rouges à la crème de coco qui m'a personnellement un peu déçue, mais moins que je l'aurais imaginé. Elle a été essentiellement préparée avec du sirop maison de myrtilles, de la grenade et de la crème de cassis (et de la gélatine, bien entendu). Une fois la mixture devenue plus ferme, j'ai tout simplement ajouté par dessus un mélange de lait et de crème de coco que j'ai fait chauffer avec un peu de maïzena et de sucre.



Et le mieux dans cette histoire, c'est que ces plats n'ont été ni très coûteux, ni très compliqués à faire. Le tout, c'est d'avoir du temps, un peu d'énergie et surtout envie de régaler ses hôtes !

Je vous souhaite à tous une excellente année 2011.

lundi 20 décembre 2010

Augusten Burroughs is my Hero - Courir avec des Ciseaux

Deux lectures en l'espace de moins de six mois. Je n'avais pas été aussi enthousiaste à propos d'un auteur depuis longtemps.

Ma découverte de Courir avec des Ciseaux et d'Augusten Burroughs a été le fruit d'un total hasard. En lisant un jour la biographie de Ryan Murphy, qui avait réussi à me fasciner avec Nip/Tuck, je me suis aperçue qu'il avait réalisé un film, jamais sorti en salles en France. Pourtant, avec un casting de rêve et une production signée Brad Pitt et Jennifer Anniston, cet ovni avait tout pour être un vrai succès. Son visionnage m'a totalement fascinée et j'ai alors eu besoin d'en savoir plus.

J'ai donc appris ainsi l'existence d'Augusten et ai immédiatement commencé à dévorer l'intégralité de son œuvre à un rythme très soutenu. Courir avec des Ciseaux n'allait être que le premier de la liste et aussi certainement le plus choquant.



Augusten Burroughs nous y conte essentiellement son adolescence chaotique dans les années 70 avec un talent teinté d'une sensibilité et d'un humour incomparable. Entouré d'un père absent et alcoolique qui semble ne lui accorder aucune attention (leur seule activité commune se résumant à emmener leurs ordures ménagères à la déchetterie) et une mère poète complètement narcissique qui ne s'intéresse à lui que par intermittence, parce qu'il lui renvoie une image d'elle-même flatteuse, le jeune Augusten a du mal à trouver sa place. Evidemment, ses parents ont des relations extrêmement conflictuelles et violentes. Sa mère souffre également de graves troubles mentaux et est régulièrement sujette à de terribles crises psychotiques.

Pour survivre, Augusten développe petit à petit une personnalité hors du commun et se rattache au peu de choses qu'il réussit à contrôler dans ce quotidien morne et malheureux (sa coiffure et l'éclat de ses bijoux, par exemple). De toute façon, il n'a alors aucun ami (il écrira en avoir eu deux par le passé, mais sa mère ayant "énervé" leurs mères respectives, celles-ci ont interdit à leurs rejetons de le fréquenter).

Si vous pensez que cette histoire n'est, somme toute, rien que de très banal, peut-être changerez vous d'avis en apprenant qu'à l'âge de 13 ans, la mère d'Augusten confie son fils de manière quasi-définitive aux bons soins de son psychiatre, un médecin farfelu qui ressemble au Père Noël, et l'abandonne littéralement dans la maison pour le moins spéciale de ce dernier. Il y vit avec sa famille recomposée et quelques patients qu'il héberge ponctuellement (ou, pour certains, de manière presque permanente).

Ce qui horrifie d'abord notre héros et nous par la même occasion, c'est l'aspect crasseux de la demeure en ruines qui jure dans le quartier, plutôt coutumier des maisons cossues et rutilantes. Lui qui aime l'ordre et la propreté est obligé, par la force des choses, de s'acclimater à un environnement complètement bordélique où disputes, tensions, mais aussi une immense liberté règnent. Cette liberté, il la chérira autant qu'elle lui pèsera, puisque comme il l'écrira, il aurait aimé que quelqu'un lui dise parfois ce qu'il ne faut pas faire. Il lui arrive donc de s'emprisonner lui-même. Mais le docteur considère que chacun, dès l'âge de 13 ans, est suffisamment mûr pour prendre ses propres décisions et Augusten apprécie de se sentir écouté pour la première fois de sa vie et de constater que l'on s'adresse à lui comme à un adulte.

Les scènes surréalistes et d'une violence psychologique souvent inouïe se succèdent et on peine à croire en 2010 que les évènements aient pu se produire tels que Burroughs les décrit. Et pourtant. Dans cette famille tellement instable et bancale, Augusten finit par s'affirmer et savoir ce qu'il veut faire de sa vie. A l'âge où une personnalité se construit généralement, celle d'Augusten se déconstruit sous nos yeux, avant que progressivement, celui-ci finisse par trouver sa voie.

Avec une lucidité et un recul incroyable sur la bizzarerie du monde qui l'entoure, l'auteur nous témoigne pourtant la tendresse qu'il ressent pour chacune des personnes de sa nouvelle famille. Mais cela ne l'empêche pas d'envier le manque d'attaches sentimentales de son frère biologique, atteint du syndrome d'Asperger.

Au fil du temps, Augusten sera sans cesse tiraillé entre deux sentiments : celui d'avoir simplement envie d'une vie normale, et celui d'être parfaitement dans son élément au sein la famille Finch.

Souvent poignantes, ses mémoires, qui portent pourtant le nom de "roman", nous emmènent sur des montagnes russes d'émotions fortes, qui nous font en permanence nous remettre nous même en question, et nous amènent à changer notre vision du monde. Avec ses mots, il a la faculté de nous montrer le meilleur des gens, nous apprend à ne juger personne sur les apparences (après tout, il s'est lui-même toujours senti différent et parlait aux branches des arbres lorsqu'il était petit). Courir avec des Ciseaux délivre avant tout un formidable message de tolérance et lorsqu'on referme le livre, on se sent changé. On a grandi, en même temps que son auteur.

dimanche 12 décembre 2010

Oh La La! à la Flèche d'Or - 3 décembre 2010

Quasiment un an et demi jour pour jour après notre dernier live du groupe de Natacha Le Jeune, nous étions fébriles à l'idée de le retrouver sur scène pour préparer la sortie de son premier album, le 24 janvier prochain. Si la salle était déserte à notre arrivée, nous eûmes tout juste le temps d'avaler une bière ou deux avant qu'une petite foule de connaisseurs arrive à la Flèche d'or et que le concert commence.

Toujours plutôt froids en arrivant sur scène, Natacha et ses deux compères ne nous adressèrent pas de bonjour. Oui, c'est là la première nouveauté : le groupe ne compte plus que trois membres, comme différents articles parus dans la presse jusqu'alors avaient pu le laisser supposer. Mais ce n'est pas tout. En lieux et places des bassistes et clavier, on retrouve... Natacha, un peu paumée, qui fait le boulot de trois personnes à la fois, pas toujours de manière très convaincante.



Pourtant, les chansons, sexy et entraînantes, étaient bien là. Natacha n'entama pas son set par le single Relax, qui tourne depuis quelques mois sur Ouï FM (l'ancienne Radio Rock cuktivée et cultivante devenue la propriété d'Arthur, monsieur Virgin Radio) mais par Goodbye Superman. Autant dire que nous les connaissions par coeur, après plus d'un an et demi passés à les écouter.

Textes provocateurs, sexuels, ambigus, le groupe fait moins dans la dentelle qu'AS Dragon, qui pourtant se posait déjà là. Natacha en rajoute même en brandissant son poing sur Un poing c'est toi (écrite par Philippe Katerine), alors que le caractère explicite de cette chanson est déjà assez évident. Si l'on redécouvre avec plaisir Rendez-vous avec un salaud, que nous n'avions plus entendue depuis longtemps, les deux nouveautés chantées en anglais s'avèrent être les titres les plus faibles du concert.



On attend un show, celui d'une bête de scène qui sait d'ordinaire transmettre son énergie rageuse et tendue. Mais malheureusement, le concert ne décollera jamais vraiment. Natacha a l'air crispée de retrouver un public parisien aux réactions quasi-inexistantes. Clément Fionio (également membre de Paco Volume, avec Antoine Boistelle, le batteur) prend quant à lui de plus en plus d'espace au sein de la formation, aussi bien sur scène qu'au chant et Natacha semble lui laisser de la place sans regrets. Si elle commence un peu à se lâcher vers la fin sur Paris ne t'aime pas, qui est incontestablement le meilleur titre du futur album, c'est un peu tard, et l'ensemble nous laisse tout de même beaucoup sur notre faim. Nous n'imaginions pas tant de froideur.




Pour sa défense, le groupe est neuf et a sans doute encore besoin  de se roder et de comprendre ce qui lui réussit. Natacha Le Jeune étant responsable de certaines de mes émotions les plus fortes en concert, j'attendrai de voir la suite (et d'écouter l'album) avant de tracer une croix sur Oh La La!



Après le set, toute stressée et timide, j'ai pris mon courage à deux mains et me suis approchée de la chanteuse alors qu'elle était au bar en train de discuter. Nous avions déjà échangé quelques messages sur Facebook et je mourrais d'envie de lui proposer une interview. Elle m'a demandé ce que j'avais pensé du spectacle. J'ai répondu que j'avais trouvé ça bien, mais qu'elle m'avait semblé tendue, surtout au début. Tout de suite, elle a semblé vexée car comme j'avais pu le lire ici ou là, ce qu'elle souhaite avant tout, c'est bien se démarquer de son ancien groupe et de l'image qu'elle avait pu y donner. Pour en savoir plus, je lui ai alors proposé de faire une interview pour le blog. Très gentille, elle m'a immédiatement écrit son adresse e-mail sur un flyer qui traînait et après l'avoir saluée, je suis repartie fière de moi et pleine d'espoir.

mardi 30 novembre 2010

Condensé de concerts en boîte

Si je devais écrire un billet pour chaque concert auquel je vais, j'y passerai sans doute la semaine. Heureusement, pour faire plus court, je peux me contenter de poster des photos, et de dire quelques mots sur chacun.

La semaine dernière, donc, mercredi 17 novembre, j'ai eu la chance et la surprise d'assister au set incroyable d'I Love Ufo sur la scène du Glaz'art. Concert intense, tourneboulant, du genre qui vous happe dès la première note et ne vous relâche que plus d'une heure après, assoiffé et en sueur. On ne sait plus vraiment où on est, ni où on habite, et on a complètement oublié qui on était. Mais c'était vraiment bon et chargé en émotions, et c'est tout ce qui compte.



Quelques jours plus tard à peine, j'ai été traîner mes baskets du côté de Boulogne Billancourt et c'est assez rare pour le souligner. Dans le cadre du festival BBMix, j'y ai découvert une charmante salle à l'acoustique plus qu'enthousiasmante : le Carré Bellefeuille. Dans l'ordre, j'ai pu y admirer samedi soir les jeunes musiciens de The Berniz, très prometteurs et professionnels, j'ai écouté d'une oreille distraite la pop froide et inexpressive de the Notes, j'ai pensé à Indochine en assistant au set des Young Michelin, j'ai rêvé devant the Radio Dept, et ai voyagé dans le temps avec les Raincoats (très bonne surprise, au demeurant).






Le lendemain, rebelote, malgré la fatigue qui commençait à se faire sentir et un bon gros rhume attrapé dans la foulée. Le dimanche soir, j'ai écouté distraitement le rock éparpillé d'Edgar Pilot, j'ai plongé dans la folk de James Blackshaw la tête la première et je me suis laissée emporter, avant d'être hypnotisée (même des oreilles) par le rock lourd et puissant de Swans. J'en suis ressortie vidée, mais heureuse.
 




Pour finir en beauté, j'ai fait le déplacement dans un froid quasi-polaire jusqu'au Café de la danse hier soir pour écouter the Tallest Man on Earth. Et seul sur scène, le petit gars a vraiment l'air grand. Il réussit à emporter la foule (le concert affichait complet) sans difficulté et à nous emmener très loin. Les demoiselles du premier rang étaient visiblement sous le charme, et pas uniquement de sa musique.



Prochaine escale musicale, si vous le voulez bien, ce sera vendredi prochain, avec Oh La La! à la Flèche d'Or, dans le cadre des Pias Nites. Et je crois que ça méritera bien un article entier.

lundi 22 novembre 2010

Soupe de tomates aux boulettes de boeuf épicées

Par un horrible dimanche soir de novembre, quand à 17h30, il fait nuit noire, qu'on n'a pas vu le soleil de la journée et qu'on doit se lever à 4h30 le lendemain, rien de tel qu'une bonne soupe pour se réconforter. Justement, j'adore ça et je teste successivement toutes les recettes possible de soupe-repas, pour qu'un ou deux bols suffisent à caler même les estomacs les plus creux.

Comme d'habitude, j'ai pris une recette basique de soupe de tomates que j'ai améliorée à ma façon.

Pour 4 personnes

Ingrédients

- 2 grosses boîtes de tomates pelées
- concentré de tomate
- 2 oignons
- 1 gousse d'ail
- Huile d'olive
- 1 cuiller à soupe de sucre
- 1 pincée de sel
- 1 bouquet garni
- 2 steaks hachés à 5 % de MG
- 1 jaune d'oeuf
- Tabasco
- Cumin
- Coriandre moulue



Hachez l'ail avec un oignon dans un fait-tout. Faites les revenir dans une cuillerée d'huile d'olive. Ajoutez deux cuillerées à soupe de concentré de tomate, et les tomates avec le jus. Saupoudrez du sucre et de sel, et ajoutez le bouquet garni. Versez de l'eau jusqu'à ce que le fait-tout soit rempli.

Faites bouillir pendant une vingtaine de minutes. 

Pendant ce temps, préparez des boulettes avec la viande, le reste d'oignon et le jaune d'œuf. Roulez les boulettes dans le cumin. Ensuite, faites-les revenir dans une poêle avec de l'huile d'olive jusqu'à ce que la viande soit cuite. Ajoutez les boulettes à la soupe.

Saupoudrez de coriandre moulue et versez quelques gouttes de Tabasco.

Servez bien chaud.

dimanche 21 novembre 2010

Rubber - Quentin Dupieux

Peu de personnes parmi vous le savent, mais je suis une grande fan de cinéma d'horreur, de films gore en tout genre, de séries Z et autres séries B. Rien ne me plaît plus, après une semaine stressante, que de regarder un tel film, en me cramponnant à mon siège comme une hystérique. C'est plus fort que moi, ça agit sur mes nerfs comme un véritable exécutoire. En outre, rien ne me plaît plus que lorsque le film en question joue avec le spectateur et manie l'humour noir. 

Je ris beaucoup, mais surtout de l'absurde et le quotidien m'amuse toujours plus qu'un spectacle comique écrit. En fait, je n'aime pas trop l'improvisation non plus, surtout dans un one-man-show, et j'ai du mal avec le stand-up, notamment parce que je ne supporte pas qu'on essaie à tout prix de me faire rire. Quand j'entends un comique lancer une vanne et attendre les éclats de rire des spectateurs, ça m'agace, je n'y peux rien. Je n'ai pas plus envie de rire dans de tels moments que s'il me tendait un panneau "RIRE" comme un vulgaire chauffeur de salle.

Pour toutes ces raisons, j'ai adoré Rubber, dernier film de Quentin Dupieux.



D'abord, le contexte annonce clairement la couleur : on est dans un désert américain, type Arizona, dans lequel on est plus susceptible de croiser une décharge sauvage qu'un autre être vivant. Évidemment, tous les classiques du genre sont réunis : la route interminable et vide, la station service glauque et presque abandonnée, avec son téléphone public qui ne fonctionne pas, et bien sûr les motels miteux des bords de route. Ah, j'oubliais, il y a aussi la traditionnelle fille en mini-short.

Maintenant que le décors est planté, il nous faut un tueur. Et c'est là que Quentin Dupieux est fort. Son tueur à lui, c'est un pneu, un simple pneu abandonné dans une décharge. A peine a-t-il pris vie qu'on le sent animé par une haine féroce contre tout ce qui l'entoure, excepté la fille en short : de la canette vide à la bouteille de bière, en passant par un pauvre lapin ou un corbeau qui n'ont commis, pour seule faute, que celle d'avoir croisé sa route. Doué de pouvoirs de psychokinésie, notre ami ne se contente bientôt plus seulement d'écraser les importuns de tout son poids, il leur fait littéralement exploser la tête...

Mais il y a mieux. Car l'épopée sanglante de notre ami Robert est suivie avidement par un groupe de spectateurs qui campent dans le désert et l'observent aux jumelles. Que font-ils là, demanderez-vous ? Apparemment, ils auraient payé leur place pour assister au spectacle, comme nous, pauvres cinéphiles qui avons dépensé plus de 10 euros pour nous retrouver dans une minuscule salle de Gaumont dans le seul but de suivre les aventures d'un pneu serial-killer.

ALERTE SPOILER (Si vous voulez voir Rubber, je vous déconseille de lire la suite, sous peine de voir l'intense suspense de ce road-movie tomber à plat) 

Tout au long du film, le réalisateur ne cesse de nous rappeler qu'il ne s'agit que de cinéma, que tout cela est fictif et qu'il ne faut surtout pas le prendre au sérieux. L'un des personnages principaux, le shérif chargé d'enquêter sur les morts suspectes, nous le prouve même explicitement lors d'une scène hilarante au cours de laquelle il demande à ses inspecteurs de lui tirer dessus et qu'il leur dit qu'il ne sent strictement rien (bien qu'il se mette à perdre des litres de ce que l'on imagine, du coup, être du faux sang).

Pourquoi le tueur est-il un pneu ? Pourquoi le shérif ne meurt-il pas en se faisant tirer dessus alors que la pauvre femme de ménage de motel finit avec le crâne déchiqueté ? Pourquoi le pneu écoute-t-il attentivement le gamin lui parler avant de faire demi-tour et de l'abandonner ? Pourquoi l'épargner alors qu'il lui balance une canette dessus ? La seule et unique réponse à cela est sans doute : No reason, et ce n'est pas le shérif qui me contredirait.

Fable poétique et contemplative, série Z, film absurde, Rubber est tout cela à la fois. Que faut-il en attendre ? Rien, surtout. N'y allez pas en espérant voir du sang, ni un film d'horreur, ni en croyant que le film vous fera mourir de rire. Mais soyez assurés de trouver en Rubber un souçon de chacun de ces ingrédients.

Scène émouvante : Le pneu est amoureux, le pneu se sent seul et moche, comparé à Roxanne Mesquida (et on le comprend). Devant un miroir, il observe successivement son profil droit, puis son profil gauche et on peut presque lire la déception sur son visage (il a un visage, puisqu'on le voit boire de l'eau).

Scène culte avant l'heure : Le shérif enlève l'un des pneus de sa voiture, l'amène devant ses inspecteurs et déclare : "Voilà à quoi ressemble notre assassin".